Les contes défaits de Tamika
Il était une fois, dans un pays pas si lointain que ça nommé la Belgique, une reine dont la bonté n’égalait que sa beauté. Cette femme, dont le nom ne pouvait être que Lena, aimait les balades dans la neige par-dessus tout. Cette étendue pâle et scintillante la fascinait au plus haut point tant et si bien qu’elle voulut une fille au teint aussi blanc que la neige. Son veux fût exaucé car, lors d’une belle nuit enneigée, une petite princesse naquit, son nom était Baarzourlalgulf, plus connue sous le pseudonyme de « Baarzou ». Hélas, Le bonheur de Lena fut de courte durée car telles les lois immuables des contes de fée, lors de la naissance de la princesse, elle mourut en couche.
Une année passa. Durant cette année, le roi n’avait eu de cesse de trouver une belle-mère à sa chère et tendre Baarzou. Il réussit à obtenir la main de la jeune Tamika de la Truite-Latineuse après avoir dilapidé la moitié de la trésorerie royale. « Quitte à vendre sa fille, autant le faire à bon prix » pensait le père de Tamika. C’était ainsi que le roi accompagné de sa nouvelle épouse rentra au château afin de consommer le mariage. Consommation qui déplu fort à la jeune demoiselle tout juste âgée de 16 ans. Sévices après sévices, la jeune reine vit son cœur s’aigrir et se ratatiner puis tomber en poussière. Elle n’avait plus rien. Elle n’était plus rien mis à part le jouet favori de ce roi rendu fou par la mort prématurée de sa Lena bien-aimée. La seule chose que Tamika pouvait encore faire en ce bas monde était d’être la plus belle du royaume et ce, par n’importe quel moyen. C’était ainsi que la passion morbide de la jeune femme avait commencée. A l’aide de son miroir magique et de cette phrase rituelle « Miroir, mon beau miroir, qui est la plus belle d’entre toutes ? » elle faisait chasser les plus belles femmes du royaume et enfermait leur cœur dans une boite. Ce que personne ne savait, c’était qu’une fois livré à la reine, le cœur était mangé par cette dernière. Cet acte de cannibalisme faisait partie d’un rituel de magie noir destiné à procurer une beauté et une jeunesse sans pareil à quiconque exécutait le sort.
Tout se passait pour le mieux dans le meilleur des mondes pour Baarzou. Son père était un papa-gâteau qui lui offrait tout ce qu’elle désirait mais elle n’en abusait jamais, sauf quand il s’agissait de glace et sa nounou, Momo-k, était la femme la plus adorable de ce monde. Elle était heureuse et surtout, elle était aimée.
Hélas, un beau jour ou un horrible jour, tout dépend du point de vue, le roi s’éteignit et partit rejoindre ses prédécesseur dans le ciel étoilé. « Ton père le roi veillera toujours sur toi » avait dit Momo-k et Baarzou l’avait crue tout en séchant ses larmes. Mais Momo-k disparut bien vite après la mort du roi, laissant seul la pauvre petite Baarzou. Après la mort de sa nounou, la vie paisible de la princesse changea pour devenir une vie de maltraitance et de servitude. En grandissant, elle perdit son sourire, ses cheveux devinrent ternes tout comme ses yeux mais malgré cela, elle devint tout de même la femme la plus belle du royaume, chose que ne pouvait tolérer son infâme belle-mère.
Par un soir d’hiver, Ryu, le fils caché de la reine, vint prévenir Baarzou du danger qui la guettait. Au départ, effrayée par la monstruosité du messager, la princesse dont le cœur était infiniment bon fut attendrit par cet être dont personne ne voulait, en particulier sa mère. Elle écouta attentivement ce que le jeune garçon lui avoua. Au fur et à mesure du récit, les yeux de la princesse s’écarquillèrent d’effroi. « Sa majesté ma belle-mère ne peut-être comme ça ! » pensait la jeune femme mais elle n’était pas au bout de ses peines. Ryu ne s’était pas arrêté après avoir parlé des rituels de magie noir, il en était maintenant aux expériences de la reine. Tamika se livrait à beaucoup d’expériences qui viraient, pour la plupart, à la catastrophe et cela, on pouvait en juger par la difformité de Ryu, cobaye attitré. Ce fut trop de révélation pour le pauvre petit cœur de Baarzou, elle fondit en larme. Ryu, difforme et attardé mais possédant une bonté sans pareil, s’empara de la princesse et la fit quitter le château sur son dos. Il l’emmena à l’orée de la forêt puis partit, la laissant de nouveau seul et ce, en pyjama dans la froideur d’une nuit d’hiver. C’était une Baarzou en pleur et frigorifié qui partit à la recherche d’un endroit où passer la nuit. Son corps était endolori par le froid et elle n’arrivait plus à avancer quand, semblant fendre le silence de la nuit, une chanson se fit entendre :
« Heigh-ho, heigh-ho, heigh-ho, heigh-ho
Heigh-ho
Heigh-ho, heigh-ho
On rentre du boulot!
Heigh-ho, heigh-ho
Heigh-ho, heigh-ho
Heigh-ho, heigh-ho
On rentre du boulot! »
Le cœur de la princesse fit un bon dans sa poitrine. « Enfin âme qui vive, mon Dieu je suis sauvée ! » pensait la jeune femme. Elle se précipita vers la source du son qu’elle entendait. Elle courait, trébuchait, se heurtait aux arbres et aux rochers mais elle se relevait bien vite et continuait sa course folle vers cet espoir. Une fois arrivée, la princesse fut prise de terreur. Des gobelins ! Tout espoir disparu dans les yeux de Baarzou. Les gobelins étaient des êtres abjects qui préfèreraient la vendre à la reine en échange d’un peu d’or. La jeune femme se détourna de la cohorte de gobelins et continua son chemin. Au final, rester au château et y mourir ou s’échapper et mourir de froid, c’était kif-kif bourricot. Perdue dans ses pensées, Baarzou ne vit pas un lapin d’un blanc immaculé se faufilé entre les arbres. Ce n’était que lorsque ce dernier la bouscula qu’elle se rendit compte de sa présence.
« En r'tard, en r'tard
J'ai rendez-vous que'que part
Je n'ai pas le temps de dire au revoir
Je suis en r'tard, en r'tard » dit le lapin en s’en allant.
Baarzou sauta sur ces pieds et poursuivit le lapin. Si jamais il y avait une chance de survivre, elle la pourchasserait ! Elle finit par attraper le lapin. Que faire avec ? Le manger cru et se servir de sa fourrure comme chaussures ? Non, sa mère bien-aimée n’aurait jamais accepté une telle cruauté. Elle opta donc pour la demande protocolaire : « Veuillez m’excuser pour ma rustrerie mon brave mais sauriez-vous où puis-je bivouaquer cette nuit ? »
« Non, non, non, non, non
Quelqu'un m'attend
Vraiment c'est important
Je n'ai pas le temps de dire au revoir
Je suis en r'tard, en r'tard » fit le lapin en se dégageant de la prise de la princesse.
Cette dernière, folle furieuse se promis mais un peu tard qu’on ne l’y prendrait plus. Elle continua son voyage, le ventre creux et sans chaussures en prime. Trop occupée par ce qu’elle ferait au prochain qu’elle trouverait, Baarzou ne vit pas l’immense crevasse qui se trouvait juste devant elle. Elle tomba dedans, les deux pieds en avant et se brisa la colonne vertébrale en deux. Elle avait mal, elle avait faim et elle avait froid excepté aux jambes qu’elle ne sentait plus. Elle ne pouvait plus qu’observer le ciel étoilé, cette voute céleste qui devait abriter son père et sa mère, ces étoiles qui devaient la protéger selon Momo-k … Baarzou eut un rictus de mépris. Sa nounou c’était bien jouée d’elle. Elle se rappelait de ce que Momo-k lui chantait quand son père est mort, un tissu de mensonge qui la consolait toujours. Elle entâma la chanson d’une voix rauque presque éteinte :
« Il vit en toi
Il vit en moi
Toujours il veille
Sur ce que tu vois
Dans l'eau qui part
Comme un miroir
Même dans ton reflet
Il vit en toi.
Comme un miroir
Même dans ton reflet
Il vit en toi »
A la fin de la chanson, Baarzou éclata de rire tel une possédé. « Ben il mourra pour de bon avec moi » pensait-elle. C’était bizarre, elle ne pouvait plus s’arrêter de rire, se rire incontrôlable qui lui sortait de la gorge, n’était pas le sien. Elle avait peur et dans un dernier sursaut de conscience, elle se dit qu’au moins, elle partirait en faisant chier 2 personnes : La reine qui ne pourrait pas renouveler son sort et qui finirait par tomber en poussière ainsi que la mort qui la regardait avec indignation. « Comment cette moins que rien pouvait-elle se moquer de moi ? » pensait la mort avant de se saisir de l’âme de la défunte. Un filet argenté sortit des orbites de la dépouille ainsi que de sa bouche. Cette fumée tournoya un instant dans l’air glacé de la nuit avant de se compresser et de donner une forme fantomatique, celle de Baarzou. La mort et le fantôme de la princesse s’envolèrent tout en chantant :
« Rêve ta mort en couleurs
C'est le secret du bonheur
Rêve que tu as des ailes
Hirondelle ou tourterelle
Et là-haut dans le ciel
Tu t'envoles, tu t'envoles, tu t'envoles »
FIN